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De son bureau au trente-deuxième étage de la First National Bank Tower, David Nash observait les cumulus qui montaient sur Portland.

La pluie serait la bienvenue en ce mois de juin étouffant. Les premières grosses gouttes touchèrent le fleuve. David regarda quelques instants le spectacle, puis tourna le dos à la fenêtre. Sur le canapé, Thomas Gault changea de position.

La presse avait surnommé David « l’Impassible », à cause du calme parfait qu’il conservait toujours devant la cour. Titre que Gault aurait aussi mérité. Il était presque huit heures. Cela faisait deux jours que le jury délibérait. Gault somnolait, cependant, indifférent au fait que douze personnes, en ce moment, décidaient s’il fallait ou non le condamner pour meurtre.

Le téléphone fit sursauter David. Gault ouvrit les yeux. L’avocat décrocha à la seconde sonnerie. Son cœur s’était mis à battre plus fort. Il tenait le récepteur d’une main moite.

« Monsieur Nash, fit la voix de l’huissier du juge McIntyre, le verdict est prêt. »

David inspira profondément pour se calmer. Il avait la bouche sèche. C’était toujours la même chose, chaque fois qu’il entendait prononcer la formule rituelle. Elle était tellement définitive… en dépit de ses nombreux succès, elle lui laissait toujours un sentiment de désespoir.

« J’arrive tout de suite », répondit David en raccrochant.

Gault s’était assis et s’étirait.

« Alors, mon vieux, c’est le moment de vérité ? » demanda-t-il avec un bâillement.

Il paraissait immunisé contre la tension que son avocat éprouvait.

« Oui, le moment de vérité, répéta David.

— Bon, on y va ? Et n’oubliez pas ce que vous allez ressentir. Je tiens à vous interviewer dès que le verdict aura été prononcé. J’ai pu parler à mon éditeur cet après-midi et il ne tient pas en place ; il veut mettre le bouquin sous presse dès que possible. Pour profiter de la publicité. »

David n’en revenait pas.

« Comment pouvez-vous penser au livre, à un moment pareil ? »

Gault éclata de rire.

« Avec les honoraires que vous me demandez, j’ai intérêt à y penser. Voyez-vous, j’ai envie de vous rendre célèbre.

— Rien ne vous atteint jamais, vous ? »

Gault étudia David un instant ; son sourire avait disparu, son regard était froid.

« Non, rien, mon vieux. Absolument rien. Sans compter, ajouta-t-il, souriant de nouveau, que j’ai vécu, fichtrement pire en Afrique. N’oubliez pas que ces pairs qui me jugent ne peuvent pas me tuer. Dans le pire des cas, j’aurai quelques années pour écrire tranquillement, aux frais de la princesse. Mais le pire ne se produira pas, mon vieux, j’ai confiance en vous. »

Gault avait un sourire communicatif et David se rendit compte que, malgré tout, lui aussi souriait.

« D’accord, Tom. Alors allons-y. »

La pluie et le vent, de l’autre côté de la rue, secouaient le grand drapeau américain qui ornait le fronton du bâtiment, l’entortillaient et le déroulaient sans ménagement autour de son mât. L’un des grands symboles américains en train de se faire étriller, songea David. S’il était à la hauteur de sa réputation, la femme au bandeau sur les yeux et à la balance en aurait aussi pris un coup sérieux lorsqu’il ressortirait du tribunal.

L’affaire Gault aurait certainement rendu David célèbre, si ce n’avait déjà été chose faite. Des journalistes étaient venus de Paris et Moscou jusqu’à Portland pour couvrir le procès d’un inculpé beau comme une vedette de cinéma et qui écrivait aussi bien que Joseph Conrad.

À dix-neuf ans, on avait donné à Gault, alors membre d’une des bandes les plus violentes de Los Angeles, le choix entre la prison et l’armée. Il avait adoré la discipline militaire et s’était naturellement retrouvé dans un centre de formation pour les forces spéciales.

À vingt-six ans, devenu mercenaire, il avait mis ses aptitudes au service de causes douteuses en Afrique de l’Est et de l’Ouest.

Pendant les années qu’il avait passées à l’étranger, il s’était également livré à une autre de ses passions : écrire. Enrichi d’éléments empruntés à son séjour africain et achevé en six mois d’un travail acharné dans un appartement minable de Manhattan, Plains of Anguish avait fait la fortune de Gault et lui avait donné une certaine notoriété d’écrivain. Ses romans suivants n’avaient fait que renforcer sa réputation. Mais ses écrits n’étaient pas la seule raison de sa célébrité.

Peu après la sortie sur les écrans du film tiré de son deuxième roman, Gault avait épousé la femme avec laquelle on le voyait le plus souvent. Les journaux à scandale ne tardèrent pas à faire leurs choux gras de ses derniers esclandres, liaisons tapageuses, bagarres d’ivrogne. Lorsque, défonçant un mur, il pénétra sa Rolls Royce jusque dans la chambre d’une villa du bord de mer appartenant à l’amant de sa femme, celle-ci déclara forfait. Gault, lassé de Hollywood, opta pour le climat plus tempéré et l’ambiance plus paisible du Nord-Ouest, en Oregon.

Il sortit un an plus tard de sa retraite avec sous le bras le manuscrit de A Ransom for the Dying, qui lui valut le prix Pulitzer. C’est pendant qu’il travaillait à ce livre qu’il avait rencontré Julie Webster, la femme qu’il était actuellement accusé d’avoir battue à mort.

Julie Webster Gault, riche et belle, fille d’un ancien secrétaire d’Etat au Commerce, était une enfant gâtée. À la grande consternation de ses parents, elle avait épousé Thomas Gault après une brève liaison surtout marquée par une série d’accouplements violents dans des lieux incongrus et des positions peu orthodoxes. Mariage voué à l’échec.

Julie Webster était incapable d’aimer quelqu’un d’autre qu’elle-même, et Thomas Gault souffrait du même syndrome. Le temps d’épuiser les nouveautés qu’offrait le catalogue revisité du Kâma sûtra, ils s’étaient tous les deux rendu compte qu’ils ne pouvaient pas se supporter. La consommation d’alcool de Gault, déjà excessive en temps normal, ne fit qu’augmenter. Julie se mit à porter des vêtements à col roulé et des lunettes de soleil pour dissimuler ses bleus. Puis, un soir, elle fut battue à mort dans sa chambre, au premier étage de leur maison au bord du lac.

La police arrêta Gault. Il jura qu’il était innocent. Il expliqua qu’il dormait, ivre mort, lorsque les cris de sa femme en provenance de la chambre l’avaient tiré de son sommeil. Selon ses dires, il avait trouvé Julie baignant dans une mare de sang et s’était agenouillé à ses côtés pour lui prendre le pouls. Un bruit, derrière lui, l’avait fait se retourner et il avait vu un homme de taille moyenne, athlétique, aux cheveux blonds frisés, debout derrière lui. L’intrus l’aurait frappé à la tête et Gault serait resté quelques instants inconscient. À l’arrivée de la police, il avait du sang sur les mains et sur sa robe de chambre, ainsi qu’une ecchymose au côté gauche du visage.

Déterminer si c’était Thomas Gault ou ce mystérieux étranger qui avait assassiné Julie Webster avait fait l’objet d’un procès de deux mois. Des écrivains célèbres et des vedettes de cinéma vinrent témoigner, soit pour raconter les scènes de ménage des Gault, soit pour plaider en sa faveur. Au fur et à mesure que s’approchait le moment du verdict, David s’était senti de plus en plus inquiet. C’est alors que Gault était venu à la barre.

Depuis que David assurait la défense de Gault, pas une fois ce dernier n’avait semblé affecté par la mort de sa femme. Il paraissait au contraire heureux d’en être débarrassé. Mais l’homme était un sacré comédien, et il avait fait un numéro superbe à la barre des témoins. Au bout de deux jours d’interrogatoire et de contre-interrogatoire, il avait réussi à se tailler l’image d’un personnage sympathique. Il avait même éclaté en sanglots pendant sa déposition. On avait envoyé le jury délibérer, et ses membres n’avaient pu voir avec quelle facilité Gault avait recouvré son sang-froid.

L’homme était ainsi. Se mettre au diapason des autres et les manipuler était chez lui un don inné. David le trouvait à la fois fascinant et terrifiant ; il voyait en lui un original avec quelque chose de mauvais au fond de lui. Tout ce qu’il savait de l’écrivain tendait à lui faire croire que le détachement qu’il manifestait était authentique. Rien ne semblait l’atteindre. Il se demandait cependant comment Gault réagirait si le jury le déclarait coupable.

*

Il y eut une explosion de flashes et une ravissante journaliste de NBC manqua de peu la lèvre inférieure de David à qui elle tendait son micro. L’avocat fit une brève déclaration avant de se frayer un chemin au milieu de la foule, afin de gagner la salle d’audience. Gault le suivait, bavardant et plaisantant avec les représentants de la presse.

Un photographe local demanda au prévenu de prendre la pose, et celui-ci s’exécuta aussitôt, repoussant en arrière ses longs cheveux bruns soigneusement brushés pour mieux révéler son profil avantageux. Avec son mètre quatre-vingts et la minceur qu’il avait réussi à conserver à sa silhouette grâce à un entraînement constant, il était tout à fait photogénique.

Les appareils photo crépitaient ; les portes du tribunal s’ouvrirent. Une rumeur d’excitation qui avait quelque chose de quasiment sexuel emplit le prétoire à l’entrée de Gault. David étudia plus particulièrement le visage des femmes. Toutes désiraient Gault. Toutes voulaient connaître l’excitation de se retrouver allongées à ses côtés, sans savoir ce qu’il avait à offrir : l’amour ou la mort.

Gault remonta l’allée centrale et se dirigea vers la petite barrière qui séparait le public du tribunal proprement dit. Un homme en jean et chemise à carreaux lui lança quelque chose que David ne comprit pas. Gault se mit à rire et le salua de son poing levé.

David suivit son client jusqu’à la table de la défense. Norman Capers, l’avocat général, était déjà à sa place. Il paraissait fatigué. L’huissier s’entretenait avec un des policiers de garde. David le salua d’un signe de tête en s’asseyant. L’huissier quitta le tribunal pour aller dire au juge que les parties étaient prêtes. Quelques instants plus tard, il alla chercher le jury.

David se sentait dans un état second. Il se tourna vers Gault pour voir si son client ne manifestait pas une certaine tension. Il fut étonné de le voir fixer intensément la porte par laquelle allaient arriver les jurés. Les conversations s’étaient tues peu à peu, et un silence absolu régnait dans la partie de la salle réservée au public.

La porte latérale s’ouvrit, les jurés entrèrent en file indienne, silencieux, et gagnèrent leur box. Aucun ne souriait et ils évitaient scrupuleusement de regarder en direction de Gault et des avocats.

David se sentit pris d’une légère nausée. C’était, pour lui, le pire moment. Il chercha des yeux le président du jury. Le papier blanc plié se trouvait entre les mains du juré numéro six, une institutrice d’âge moyen. Il essaya de se souvenir : comment avait-elle réagi aux dépositions ? Etait-ce bon ou mauvais signe que le jury l’ait choisie comme présidente ?

Le silence devint total. L’huissier appuya sur une sonnette qui le reliait au bureau du juge Mclntyre. Celui-ci entra par la porte située derrière l’estrade.

« Asseyez-vous », dit-il d’une voix qui tremblait légèrement – comme Capers et Nash, il avait trouvé ce procès épuisant.

« Le jury est-il parvenu à un verdict ? demanda Mclntyre.

— Oui », répondit la présidente du jury, tendant le papier qu’elle tenait à l’huissier.

Gault se pencha pour suivre le document pendant qu’il passait du box du jury au bureau du juge. Il y eut une toux dans le public, une chaise racla le sol.

Le juge Mclntyre ouvrit lentement le papier, puis le lut avec soin. Ensuite, sans regarder Gault, il déclara :

« Sans donner les attendus, voici quel est le verdict : Nous, membres du jury, dûment réunis en délibération et ayant prêté serment, déclarons le prévenu, Thomas Gault, non coupable des charges qui pèsent contre lui… »

Il y eut un instant de silence ; puis quelqu’un, dans la salle, se mit à pleurer. David laissa échapper un profond soupir et s’enfonça dans son fauteuil. Gault n’avait pas bougé, comme s’il n’avait pas entendu. Puis ce fut un vrai pandémonium – les journalistes se bousculaient pour atteindre les premiers le box de la défense.

Dans le désordre, tout le monde oublia les jurés. David, seul, les regarda sortir. Pas un d’eux n’eut un regard pour l’homme qu’ils venaient d’acquitter. Pas un d’eux ne paraissait partager la joie qu’exprimait le public. David savait pourquoi. Pour acquitter un accusé, les jurés n’étaient pas obligés de le croire innocent. La loi exigeait seulement, pour cela, qu’il existe dans leur esprit un « doute raisonnable » sur sa culpabilité. Or David était passé maître dans l’art de créer ce doute raisonnable et, une fois de plus, il avait triomphé. Il n’en savait pas moins ce qu’aurait été le verdict avec des normes moins rigoureuses. Gault avait proclamé d’emblée qu’il était innocent, et pas un instant n’avait dévié de la version des faits donnée au départ. Et néanmoins, jamais David ne l’avait cru innocent. Jamais.

L’avocat se leva et quitta le box de la défense. Norman Capers ne s’était pas attardé, et David voulait lui serrer la main. Il avait fait un travail sérieux. Les admirateurs de Gault se pressaient autour de lui pendant que partaient les flashes. À la solennité du tribunal avait brusquement succédé une ambiance de carnaval. Les reporters se bousculaient autour de son client, mais David savait que son tour n’allait pas tarder à venir.

Il s’efforça d’éprouver quelque chose de positif face à cette victoire, mais il se sentait vide à l’intérieur. Il ne ressentait aucune joie, aucune exaltation ; et pourtant, tous les avocats d’assises du pays auraient donné leur bras droit pour pouvoir plaider à sa place dans cette affaire.

Il se souvint de ce qu’il avait éprouvé à l’issue de son premier procès criminel. Amusant. Ce n’avait pas été une question d’honoraires. Bon sang, non : il avait été commis d’office. Il n’en avait tiré aucune gloire. À l’exception des quelques vieux qui occupent leur retraite en venant assister aux procès, personne n’avait pris la peine de se déranger.

L’inculpé était un petit voleur sans envergure qui avait touché le gros lot en abattant un commerçant lors du braquage d’un magasin d’alcool. Rien ne plaidait en sa faveur dans son dossier et sa culpabilité ne faisait aucun doute ; n’empêche, cela n’avait pas arrêté l’avocat débutant qu’il était – un avocat bouleversé par la confiance que lui faisait l’homme. La vie de ce dernier dépendait du talent de David, qui avait tout tenté, jusqu’à l’épuisement, sachant très bien que ça ne marcherait pas. Il avait exploré toutes les voies légales, toute la jurisprudence, mais cela n’avait pas suffi.

Le verdict n’avait pas tardé à tomber : coupable.

David s’était ensuite entretenu pendant une heure avec son client dans le parloir de la prison. L’homme paraissait se moquer de son sort David, lui, ne s’en moquait pas. Ce soir-là, seul dans son bureau, il avait pleuré de frustration, puis il était rentré chez lui et s’était tranquillement soûlé.

Le bon temps. Il ne pleurait plus, aujourd’hui. Fini de s’investir affectivement. Tout ce qui lui restait, c’était gagner. Et l’argent. Depuis quelque temps, il se demandait même si cela était important. Il avait atteint les objectifs dont les autres avocats ne faisaient que rêver. Il était l’un des principaux partenaires d’un prestigieux cabinet juridique, il était connu dans tous les Etats-Unis, il était riche. Sa carrière avait été menée au pas de charge, et il n’avait guère eu le loisir, jusqu’ici, de se poser des questions. Maintenant qu’il avait atteint les sommets, il avait le temps de reprendre son souffle et de regarder autour de lui. Le spectacle ne lui plaisait que médiocrement.

« À combien vous en êtes ? lui demanda un reporter du Washington Post.

— Pardon ?

— Combien d’affaires de meurtres à la suite ? »

Il chassa ces sombres pensées et redevint sur-le-champ « l’Impassible ». Si certains des journalistes avaient remarqué sa distraction, aucun ne s’en étonna.

« Je vais vous répondre honnêtement, dit-il avec le sourire de celui qui s’apprête à faire une confidence. Je ne compte plus. Ce doit être le sixième, il me semble.

— Pour quelle raison pensez-vous que le jury a acquitté Gault ? lui demanda un journaliste à l’accent étranger.

— Parce qu’il est innocent, répondit-il sans hésiter. Si Tom n’avait pas été quelqu’un de célèbre, on ne l’aurait même pas poursuivi. Je suis cependant content qu’on l’ait fait. Ça vous donne du boulot, les amis, et vous évite de traîner dans les rues.

— Et vous, ça vous fait toucher un joli paquet », lança quelqu’un.

Tout le monde éclata de rire, David y compris, mais c’était sans conviction. Il était recru de fatigue et n’avait qu’une envie : rentrer chez lui.

Il y eut des mouvements à sa droite, et il tourna la tête. Gault se dirigeait vers lui, main tendue. La masse des journalistes et des admirateurs s’écarta lentement, et l’avocat eut le temps d’étudier le visage de son client. Ce dernier lui adressa un clin d’œil, puis leurs mains se touchèrent.

« Je dois la vie à cet homme ! rugit Gault. Il est le roi ! Et je vais tellement le soûler, ce soir, qu’il ne sera pas en état de défendre qui que ce soit avant un an ! Et à présent, bande de rigolos, ceux d’entre vous qui veulent se joindre à nous n’ont qu’à se mettre en rang. Il y a assez de gnôle à la maison pour soûler même un journaliste. Allons-y ! »

Gault prit David par le coude et passa un bras autour des épaules de la jeune et séduisante journaliste de NBC. David savait qu’il était inutile d’essayer de se défiler. La foule l’entraîna. Sur les marches du palais de justice, il eut le temps d’apercevoir Norman Capers qui montait dans sa voiture, garée à quelque distance. David lui envia sa solitude et la limpidité de sa conscience.

Le Dernier Homme Innocent
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